Fragments d'Arménie(s)
Une exposition de tableaux photographiques de Pascal Maguesyan.
enluminés par le peintre Artouch Mkrtchian et la fleuriste Aurélie Martin
Il n'y a pas une mais des Arménie(s) ! C'est une question de perception.
Antique (aux frontières de Rome et d'Ispahan); méditerranéenne (et cilicienne), anéantie sur les chemins d'Anatolie, échouée sur les rives de Beyrouth et de Marseille, officielle et caucasienne, insoumise dans le Haut-Karabagh, réelle et rêvée, d'hier et d'aujourd'hui, des berges de Lyon aux collines de Erevan...
Née de la pierre, élevée dans la prière, l'Arménie est devenue poussière en 1915. Depuis, les arméniens s'efforcent de rassembler les fragments de leur identité pour édifier une société.
Ces « Fragments d'Arménie(s) » témoignent d'une civilisation aux mille et un visages.
Première partie : L'art & la foi
1- Le monastère de Saint Thaddée et l'héritage arménien en Iran du nord
Vous connaissez probablement Saint Pierre de Rome ou Saint Jacques de Compostelle. On y vient du monde entier, en voyage et en pèlerinage, visiter et prier. Et bien, le monastère de Saint Thaddée, est lui aussi un lieu sacré du christianisme, en Iran. Ce haut lieux spirituel abrite, selon la tradition, la dépouille de l'apôtre : Thaddée, connu aussi sous le nom de Jude. Il se situe, à près de 2000 mètres d'altitude, sur de hauts plateaux arides et majestueux, au sud de l'Ararat, la montagne de Noé. Nous sommes ici, à l'extrémité nord-ouest de l'Iran, au cœur de l' antique Arménie méridionale et médiévale. Ce lieu autrefois très fréquenté est aujourd'hui vide mais pas abandonné. Chaque été, fin juillet, des milliers d'arméniens et d'assyro chaldéens d'Iran viennent y célébrer leur foi.

« Il était une fois »
Monastère arménien de Saint Thaddée
Province du Vaspouragan. Canton d'Ardaz. Nord-Ouest de l'Iran. Eté 2000

« Du haut des crêtes »
Monastère arménien de Saint Thaddée
Province du Vaspouragan. Canton d'Ardaz. Nord-Ouest de l'Iran. Eté 2000

« En route »
Monastère arménien de Saint Thaddée
Province du Vaspouragan. Nord-Ouest de l'Iran. Eté 2000

« Le pèlerinage »
Monastère arménien de Saint Thaddée
Province du Vaspouragan. Nord-Ouest de l'Iran. Eté 2000

« Jour de baptême »
Monastère arménien de Saint Thaddée
Province du Vaspouragan. Nord-Ouest de l'Iran. Eté 2000

« Jours de Fête »
Monastère arménien de Saint Thaddée
Province du Vaspouragan. Nord-Ouest de l'Iran. Eté 2000
Aux alentours du monastère de Saint Thaddée

« Sourp Nahadag »
Chapelle du Saint Martyr
Province du Vaspouragan. Nord-Ouest de l'Iran. Eté 2000
2- Dzor-Dzor : Fragments d'un monastère arménien en Iran
À 4 heures de marche de Saint Thaddée, se trouve l'église Sainte Mère de Dieu du monastère de Dzor-Dzor. Ce site fut au 14ième siècle un lieu de « rencontre » entre l'Eglise d'Arménie et l'Eglise de Rome. Du monastère, il ne reste plus que cette petite église cruciforme, découverte en 1977, démontée pierre par pierre, remontée et restaurée 80 mètres plus haut, pour éviter qu'elle ne soit engloutie sous les eaux d'un barrage à l'entrée des gorges de la rivière Makou.
3- Ecriture et art sacré
L'alphabet arménien a été créé au tout début du 5ième siècle par un moine de la cour royale nommé Mesrop Machdots. L'alphabet qu'il a créé se composait à l'origine de 36 lettres. 2 autres lettres furent rajoutées par la suite. L'arménien était parlé avant d'avoir été écrit. Cette codification correspondait initialement à des impératifs religieux et politiques. Son usage a été très rapidement étendu à tous les aspects de la culture arménienne.

« Fragments d'arménien »
Monastère arménien de Saint Thaddée
Province du Vaspouragan. Nord-Ouest de l'Iran. Eté 2000
De toutes les expressions architecturales et spirituelles typiques de l'identité arménienne, les Khatchkars sont parmi les plus singulières. Ce sont des « croix de pierre », dont les origines remontent aux premiers siècles du christianisme. Elles sont en général ornées de motifs floraux et végétaux.
4- Ailleurs en Iran
L'Iran, au delà du miroir politique, demeure un lieu de rencontre des cultures et des civilisations. C'est le fruit de l'histoire et des croisements entre les civilisations perses, arméniennes et assyriennes.

« L'évêque et l'enfant »
Bastam. Plaine de Tchors. Azerbaïdjan occidental. Nord de l'Iran. Eté 2000

« Le tympan »
Eglise assyrienne Saint Paul et Saint Serge de Sir
District d'Ourmia. Nord-Ouest de l'Iran. Eté 2000
5- Etchmiadzine - République d'Arménie
Etchmiadzine est le siège de l'église apostolique arménienne. Sa cathédrale, fondée au début du 4ième siècle, a été plusieurs fois restaurée et agrandie, jusqu'au 18ième siècle.

« Hichia Der »
Cathédrale d'Etchmiadzine. Siège de l'église apostolique arménienne
Arménie. Novembre 2000
6- Haghardzine - République d'Arménie
Le monastère de Haghardzine est situé au nord de la République d'Arménie, près de la ville de Dilidjan. Cet ensemble monastique, aux proportions modestes, a été érigé entre le 11ième et le 13ième siècle.

« Automne à Haghardzine »
Monastère de Haghardzine
Nord de l'Arménie. Novembre 2000

« Le vieil arbre, le vieux prêtre et la vieille croix »
Monastère de Haghardzine
Nord de l'Arménie. Novembre 2000
Deuxième partie : une société dans la tourmente
1- Le génocide des arméniens
à la veille de la Grande guerre et du génocide, les arméniens étaient entre 2 et 3 millions. Au centre de toutes les convoitises des puissances européennes et de leurs alliés, aux carrefour des empires perses, russes et ottomans les arméniens vivaient en Anatolie orientale et occidentale, mais aussi sur les rives de la méditerranée, en Cilicie. La vie des arméniens était rude, mais la culture toujours centrale. Le génocide arménien commence le 24 avril 1915 par l'arrestation et l'assassinat de plusieurs centaines de personnalités arméniennes de Constantinople. Ces rafles décapitent les forces intellectuelles, politiques, religieuses et sociales de la nation. Elles marquent le début d'une politique minutieuse d'extermination de la population arménienne. La diaspora arménienne est née de cette grande catastrophe, « Medz Yeghern ». Une vague destructrice qui s'est également étendue aux assyro chaldéens de l'empire ottoman.
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« Medz Yeghern »
Jean-Paul 2 au Dzidzernagapert. Mémorial du génocide des arméniens
Arménie. Septembre 2001
Portraits de rescapés et lieux de mémoire
Mémorial du génocide des arméniens et des crimes contre l'humanité
Inauguré le 24 avril 2006, sur une esplanade en plein cœur de la ville de Lyon, ce mémorial est aussi et surtout un espace ouvert sur la vie. Une forêt de stèles élancées vers le ciel.

« Noé »
Noé Muradian.
Inauguration du mémorial du génocide des arméniens et des crimes contre l'humanité
Lyon. 24 Avril 2006
2- Séisme- Guerre du Haut-Karabakh- Réfugiés / Renaissance-solidarité-fraternité
« Entrez, vous êtes en Arménie ». Entrez... vous diront les arméniens, venez à notre table ! C'est que la table est toujours garnie pour le visiteur d'un jour. On y étale tout pêle-mêle et à profusion: les plats bien mijotés, les légumes du marché, les fruits, les gâteaux, la vodka, le cognac mais aussi et surtout les sentiments, le bonheur de partager, l'amertume, l'angoisse et la colère. C'est à table et entre amis, que l'Arménie se dévoile d'abord avec pudeur et délicatesse, puis dans la fièvre et le désespoir. Car l'Arménie c'est tout cela : un pays d'ombres pesantes et de lumières crues. Une civilisation rayonnante, mais aussi un pays martyrisé, brisé, éclaté : Le génocide et l'exode en 1915, la soviétisation en 1920, le tremblement de terre en 1988 , la guerre du Haut-Karabagh, le blocus économique turco azéri, l'exil après 15 ans d'indépendance. Reste l'espérance de jours meilleurs et d'un avenir serein. C'est tout cela aujourd'hui l'Arménie, ces Arménie(s) du Caucase et de la Diaspora, que l'on partage, à table, en famille et entre amis.
2(a)- Le séisme
7 Décembre 1988. 11h41. Nord Ouest de l'Arménie. La terre tremble. L'Arménie était encore soviétique et rêvait déjà d'indépendance. Une renaissance dans la douleur, mais une dignité toujours préservée.
Le séisme / La fraternité
A Gogaran, dans la zone sinistrée par le séisme, un chantier de reconstruction de maisons a favorisé dès 1989, la rencontre des arméniens de la diaspora et ceux de l'Arménie (ex-soviétique). Un élan salutaire, initié par l'Organisation Terre et Culture. A l'instar de cette organisation, de multiples associations ont noué, dès cette époque, des liens de solidarité et de fraternité durables.

« OTC »
Les ouvriers de la centrale nucléaire de Medzamor avec les volontaires de l'Organisation Terre & Culture
Gogaran.
Zone sinistrée après le séisme survenu le 7 décembre 1988, à 11h41
Arménie. Eté 1989
2(b)- La guerre dans le Haut-Karabagh
Détaché de l'Arménie par les soviétiques au début du 20ième siècle et confié à l'Azerbaïdjan, le Haut-Karabagh a demandé en 1988 son rattachement à l'Arménie. Le refus de Gorbatchev, le nationalisme azéri et les pogroms anti-arméniens de Sumgaït, Bakou et Kirovabad ont conduit à la guerre. Après 6 ans de conflit, le cessez le feu a été négocié en 1994. Il est toujours en vigueur. Le Haut-Karabagh a proclamé son indépendance.
La guerre dans le Haut-Karabagh / La vie sous les bombes
A Stépanakert, capitale du Haut-Karabagh, la vie sous les bombes n'a jamais cessé.

« Au marché »
Après les bombes. Stepanakert. Haut-Karabagh. Septembre 1993

« A l'école »
Après les bombes. Stepanakert. Haut-Karabagh. Septembre 1993
2(c)- Les réfugiés arméniens d'Azerbaïdjan
En 1988, des milliers d'arméniens ont fui l'Azerbaïdjan, où ils habitaient et travaillaient, à la suite des pogroms qui ont été commis dans un certain nombre de villes comme Sumgaït, Bakou et Kirovabad. Ils ont été accueillis en Arménie, dans des conditions économiques et sociales précaires. Quelles que soient leurs difficultés, j'ai toujours été impressionné par l'expression de leur grande dignité.